"Stop au frein à l'endettement".

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Une lettre de ... Dr. Christian Jasperneite. Le stratège en chef de M.M.Warburg & CO explique pourquoi l'épargne n'a plus de sens après la démission du président de la Bundesbank Weidmann.

Je sais - ceux qui me connaissent depuis longtemps se frotteront peut-être les yeux d'étonnement en lisant ce titre. Après tout, cela fait des décennies que j'argumente contre l'endettement public excessif.

Mais je suis là et je ne peux pas faire autrement. Depuis dix ans, Jens Weidmann s'est battu sans relâche en tant que président de la Bundesbank pour que la BCE ne devienne pas une institution dont la mission essentielle est de refinancer les Etats de la zone euro à bas prix. Il a désormais jeté l'éponge. Nous avons devant nous une période où la politique monétaire de la BCE ne s'inscrit plus dans la tradition d'une banque fédérale indépendante, mais dans celle des banques centrales du sud de l'Europe, qui ont été traitées par leurs Etats comme des départements du ministère des Finances.

Dans le même temps, la Commission européenne débat de l'assouplissement des critères de Maastricht et de l'autorisation d'un endettement de 100 pour cent au lieu de 60 pour cent par rapport au produit national. Cela va de pair. En effet, avec un endettement de 100 pour cent, le calcul n'est mathématiquement possible, avec des hypothèses de croissance plausibles, que si l'on suppose des taux d'intérêt proches de zéro pour cent pour une durée quasi illimitée. C'est précisément ce que la BCE semble vouloir garantir.

Parallèlement, l'UE évolue vers une union de transfert et de responsabilité, dans laquelle les risques budgétaires sont de plus en plus partagés. Le fonds d'aide Corona de 750 milliards d'euros est un pas dans cette direction. La pandémie passera, mais le financement et la responsabilité communs resteront.

De toute évidence, les règles ont changé en Europe. Je me demande s'il est encore économiquement rationnel d'appliquer un frein à l'endettement national. Après tout, si de nouveaux critères de Maastricht étaient appliqués à l'avenir, ceux-ci cimenteraient l'écart d'endettement entre l'Allemagne et le reste des pays de l'UE. L'Allemagne évoluerait à nouveau lentement vers les 60 pour cent, tandis que pour le reste, même atteindre les 100 pour cent serait presque utopique. Pour rappel, la moyenne européenne sans l'Allemagne se situe plutôt déjà à 110 pour cent - tendance à la hausse.

Les partisans du frein à l'endettement affirment que l'Allemagne doit faire des économies pour maintenir sa solvabilité - et donc celle de l'UE - au plus haut niveau. Je pense que c'est une folie économique. Aucun pays au monde ne serait assez altruiste pour s'épargner presque à mort afin de maintenir une solvabilité dont les autres profiteraient en premier lieu dans une union monétaire et de responsabilité.

On peut le dire de manière encore plus crue. Dans cette situation, une voie particulière pour l'Allemagne n'aurait de sens que si l'on prévoyait de quitter le club et donc l'UE et la zone euro. Car dans ce cas, on serait à nouveau seul responsable de ses dettes.

C'est précisément ce que personne ne veut en Allemagne, et c'est très bien ainsi. Mais si nous prenons délibérément la décision de rester dans l'UE et la zone euro, et si nous ne sommes manifestement plus en mesure d'influencer l'élaboration des règles - voir la démission du président de la Bundesbank, M. Weidmann -, nous devrions adapter notre comportement aux nouvelles règles.

Si, par exemple, l'Allemagne augmentait son endettement au niveau des autres pays de l'UE, nous pourrions dépenser près de 1600 milliards d'euros supplémentaires. Ceux qui ont du mal à classer ce chiffre : Le budget fédéral total est d'environ 400 milliards. Nous pourrions sans problème augmenter de manière spectaculaire les dépenses d'éducation et réduire massivement les impôts. L'infrastructure pourrait être rénovée de fond en comble et les investissements pour le changement climatique pourraient être entrepris avec courage.

Les sceptiques se demanderont peut-être : est-ce que cela peut marcher ? Supposons que cette orientation nous conduise tous dans le mur dans 20 ou 30 ans. Il est alors préférable de prendre un nouveau départ avec une bonne infrastructure et une main-d'œuvre qualifiée bien formée plutôt qu'avec un pays qui aura économisé à mort jusqu'à ce moment-là, qui sera ensuite responsable de tous les autres et qui devra donc quand même repartir de zéro. C'est pourquoi le frein à l'endettement doit être supprimé.

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